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Ahoua Don Mello : représentant des BRICS pour l’Afrique de l’Ouest, un poste fictif ? (Douglas Mountain)

Don Mello Brics

Candidat retenu à la présidentielle d’Octobre, Ahoua Don Mello (63 ans) a toujours été une voie forte dans le camp du président Gbagbo. Il est aux côtés de l’homme dans le front populaire ivoirien d’abord dans la clandestinité, puis dès l’instauration du pluralisme politique en 1990. Pourtant les relations entre les deux hommes ont toujours été teintées d’une certaine méfiance. Entre 1997 et 1999, Ahoua Don Mello claque la porte du parti de son mentor. Mais en 1999, suite au putsch du général Guei et au bouleversement qui s'ensuit, il revient à ses côtés. Après la victoire de Laurent Gbagbo présidentielle d’Octobre 2000, ADM est nommé directeur général du BNETD, une structure de premier plan en Côte d'ivoire .

Ce poste est certes important, mais l’éloigne de la sphère politique. Il va rester dix ans à la tête de cet organisme. Lors de la crise post-électorale de 2010-2011, il est porte-parole officiel du camp présidentiel. Ingénieur des ponts et chaussées, il a une argumentation posée et structurée quand il s’exprime. Comme bon nombres de personnalités proches du président Gbagbo, il s’exile au terme de la crise. Il est signalé dans divers pays africains, Rwanda, Afrique du Sud, Guinée Conakry, …. Il rentre en Côte d’Ivoire suite à la loi d'amnistie prise envers les exilés politiques. L’homme a pris du volume pendant son exil, se faisant un nom au sein des "panafricanistes".

En se présentant à la présidentielle, ADM rompt de nouveau avec le président Gbagbo. L’homme n’exerce plus de fonctions officielles en Côte d’Ivoire, contrairement à certains de ses camarades qui ont rejoint le corps qui les employait avant la crise de 2010-2011. Aujourd’hui il se présente comme le "représentant des BRICS pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre", et le vice-président de " l’Alliance Internationale des projets stratégiques des BRICS ", deux étiquettes sur lesquelles des précisions doivent être apportées.

A la différence des organismes internationaux entre tels que l’OIF, L’UE, L’UA, le Commonwealth, la CEDEAO, les Nations Unis, la ligue Arabe, l’ASEAN.... etc….les BRICS ne sont pas une organisation avec une charte, des organes et un siège. Ce n’est pas une entité juridique. Les BRICS sont un forum qui regroupe un certain nombre d’Etats, à l’image du G7, et du G20. C’est un espace de discussions des économies émergentes, avec une présidente tournante, sur le modèle du G7 dont il se veut une réplique. Il n’y a pas une d’administration au niveau des BRICS, à charge pour chaque pays de mettre en œuvre les décisions prises lors des sommets. Ne constituant pas une entité juridique, les BRICS ne peuvent avoir de représentant officiel nulle part.

En outre, si les BRICS ont un "représentant pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre", cela suppose qu’ils en ont pour les autres parties de l’Afrique, et du monde. Pourtant, il n’est fait mention de ses "représentants" nul part. Ce poste, s'il existe réellement, semble unique et seulement réservé à l’Afrique de l’Ouest et du Centre, une région dont le poids dans la géostratégie mondiale reste plutôt négligeable. On ne voit pas pourquoi les BRICS vont désigner un représentant seulement pour l'Afrique de l'Ouest et du centre, à l'exclusion des autres régions du monde. Cela n'a pas de sens.

ADM du fait de son expertise des questions de développement en Afrique, fut recruté par le patronat russe en 2021, pour être chargé des questions liées aux investissements en Afrique. Or depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine en Février 2022, la Russie est sous embargo des pays occidentaux. Elle est exclue du système SWIFT, un système de compensation par lequel transitent les règlements liés au commerce international. Il est devenu très compliqué et très dangereux de commencer aujourd’hui avec la Russie. Cela peut vous valoir des sanctions. La Russie vend désormais son pétrole en contrebande, par ce qu’on appelle sa "flotte fantôme", des navires dont l’immatriculation change constamment afin d'échapper à toute traçabilité.

Ainsi ADM n’a pas intérêt à mettre en avant ses liens avec le patronat russe, cela peut lui valoir une interdiction de séjour dans l’UE, aux Etats Unis, au Canada etc… Cela peut aussi entraîner la traque et le gel de ses avoirs dans les banques occidentales. Il n'a pas coupé les ponts avec le patronat russe. Mais hors de question pour lui de mettre au grand jour de tels liens. En se prévalant d’une fonction au sein des BRICS, il se veut à la fois proche et loin de la Russie, dans le même temps il s’arroge un titre qui le fait monter en grade aux yeux de ses concitoyens ivoiriens. Il veut donner l’image de quelqu’un qui a des responsabilités internationales, ce qui n’est pas le cas dans la réalité.

Il se présente aussi comme le "vice-président de l’Alliance Internationale des projets stratégiques des BRICS". En fait, là encore, cette "alliance" est un forum, une sorte de Think Tank (cercle de réflexion) qui regroupe les experts qui disent vouloir faire la promotion des projets des BRICS. On a jusque-là bien peu entendu parler de cette organisation, de ses initiatives. Elle est établie à Moscou mais semble ne pas avoir de siège connu. Elle se présente sur son site comme " une communauté d’experts et des spécialistes des relations internationales dans l’établissement et le développement des relations internationales publiques dans divers domaines. L’une des tâches clés de l’alliance est d’aider à sélectionner des partenaires optimaux et un soutien à la promotion de projets de format international, conformément aux programmes généraux des BRICS".

Le vocabulaire est lourd, mais le contenu de tout cela est vide. Nous avons affaire à des experts qui se réunissent et discutent, mais dont les décisions ne vont pas au-delà des murs des locaux abritant leurs conclaves. C’est un groupe informel qui émet des contributions dans des organes de presse classés à gauche. Il n’est pas exclu que certains d’entre eux conseillent des gouvernements de manière plus ou moins directe, mais tout cela reste quelque chose d’informel, en ce sens que nous n’ avons pas affaire à une structure inter étatique dûment constituée.

Les liens dont Ahoua Don Mello se prévaut vis-à-vis des BRICS sont pour le moins flous, plutôt inexistants. La fonction de "représentant des BRICS pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre " est tout simplement fictive car les BRICS n’ont aucune administration qui les accompagne. S’il est représentant alors c’est de façon bénévole et non officielle, car il n’a reçu aucun mandat dans ce sens. On remarquera que la capitale où est supposé résider ce "représentant" n'est jamais mentionnée, ce qui est toujours le cas chaque fois pour les organisations internationales . ADM conseille le patronat russe, qui à son tour conseille le gouvernement russe dans ses échanges avec les autres membres des BRICS. Les choses s’arrêtent là.

Quant à sa seconde étiquette, "vice-président de l’Alliance internationale des projets stratégiques des BRICS ", on peut lui concéder cela, cette "alliance" n’étant qu’un club de réflexion qui s’est mis en place là encore sans aucun mandat des BRICS, qui rappelons-le n'ont ni charte, ni organe, ni siège. A la tête de cette "alliance " nous trouvons bien une russe, mais il n’est pas exclu que l’intéressé (ADM) soit à l’origine de la création de ce club de réflexion, le tout étant de se donner une notoriété internationale, du moins en apparence.

Douglas Mountain
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Le Cercle des Réflexions Libérales

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